Divergence des politiques monétaires, atténuation des pressions inflationnistes et affaiblissement du contexte intérieur

Corrado Tiralongo - 10 décembre 2025

L’inflation mondiale continue de reculer vers 2,5 %, bien que les écarts régionaux s’accentuent. Les États-Unis font face à une inflation persistante des services, ce qui devrait maintenir l’inflation fondamentale des dépenses de consommation personn

Corradi Tiralongo

Résumé :

  • L’inflation mondiale continue de reculer vers 2,5 %, bien que les écarts régionaux s’accentuent. Les États-Unis font face à une inflation persistante des services, ce qui devrait maintenir l’inflation fondamentale des dépenses de consommation personnelle1 près de 3 % jusqu’en 2026, tandis que la zone euro devrait rester sous la cible et que la Chine demeure en déflation en raison d’un surinvestissement chronique. Les pressions sur les chaînes d’approvisionnement sont faibles, et les prix de l’énergie devraient exercer une légère pression à la baisse sur l’inflation des marchés développés.
  • La Réserve fédérale aborde le mois de décembre avec l’un de ses comités les plus divisés depuis des années. La disponibilité limitée des données a accentué la division entre les « faucons » et les « colombes », mais les communications récentes laissent entendre qu’il y a juste assez de soutien pour une nouvelle baisse de 25 points de base. L’inflation fondamentale des services hors logement2 qui s’attarde aux alentours de 3,3 % et les préoccupations persistantes des présidents régionaux augmentent la probabilité de divergences d’opinions et la probabilité d’une pause de la politique monétaire au début de 2026.
  • Canada’s economy is weaker than the headline GDP figures imply. Third quarter growth of 2.6 percent was driven entirely by an 8.6 percent annualised slump in imports, while domestic demand fell. Household consumption contracted for the first time since 2020, and business investment declined for a third straight quarter. October’s advance GDP estimate points to further underlying weakness.
  • L’économie canadienne est plus faible que ne le laisse entendre le PIB global. La croissance de 2,6 % au troisième trimestre était entièrement attribuable à une chute annualisée de 8,6 % des importations, tandis que la demande intérieure a reculé. La consommation des ménages a diminué pour la première fois depuis 2020, et l’investissement des entreprises a baissé pour un troisième trimestre consécutif. L’estimation anticipée du PIB d’octobre laisse entrevoir une autre faiblesse sous-jacente.
  • Les conditions du marché du travail demeurent contrastées. L’Enquête sur la population active montre de solides gains, mais ceux-ci semblent surestimés compte tenu de l’échelonnement de la population, qui n’a pas encore été rajustée en fonction du ralentissement de l’immigration. À l’inverse, l’Enquête sur l’emploi, la rémunération et les heures de travail indique des pertes d’emplois cumulatives jusqu’en septembre, concentrées dans les secteurs exposés aux droits de douane, ce qui met en évidence la fragilité de la demande de main-d’œuvre sous-jacente.
  • On s’attend généralement à ce que la Banque du Canada maintienne son taux directeur à 2,25 % en décembre. La faiblesse de la demande intérieure et la modération des pressions sur les prix de base, soutenues par l’élimination des contre-tarifs douaniers, créent les conditions pour un nouvel assouplissement en 2026, une fois que l’inflation reviendra de façon durable à la cible. Les décideurs demeurent prudents pour l’instant, mais il est probable qu’ils abaissent le taux directeur sous le niveau neutre d’ici la mi-2026 si la dynamique économique ne s’améliore pas.

Préparer le terrain : Un paysage macroéconomique en mutation dans les principales économies

Les données récentes provenant des grandes économies indiquent un environnement où l’inflation se normalise progressivement, mais où les forces sous-jacentes varient considérablement. Pour le Canada, la combinaison de l’affaiblissement de la demande intérieure et de l’atténuation des pressions sur l’inflation fondamentale crée un contexte macroéconomique plus difficile que ne le suggère la croissance globale. Aux États-Unis, les décideurs sont aux prises avec une incertitude considérable et des désaccords internes, même si l’inflation demeure au-dessus de la cible. Ces dynamiques façonneront les conditions financières au tournant de 2026.

L’inflation mondiale s’atténue, mais demeure inégale

L’inflation devrait avoisiner les 2,4 % à 2,5 % à l’échelle mondiale au cours de l’année à venir, bien que l’équilibre des risques varie considérablement selon les régions. Les États-Unis continuent de connaître une inflation élevée dans le secteur des services, le Japon fait face à des pressions persistantes sur les prix liées aux salaires, la zone euro devrait dépasser son objectif de 2 % et la Chine demeure en déflation en raison d’une capacité excédentaire de longue date.

Dans les économies avancées, l’utilisation des capacités reste faible et les pénuries signalées se sont estompées avec un retour à des niveaux proches de ceux d’avant la pandémie. Cela reflète l’assouplissement général des contraintes liées à la chaîne d’approvisionnement. Comme il a été souligné dans le Global Inflation Watch (veille de l’inflation mondiale), les prix de l’énergie devraient freiner légèrement l’inflation, renforçant la tendance à la désinflation dans les marchés développés.

États-Unis : une Réserve fédérale divisée se prépare à un vote contesté

La prochaine réunion du comité fédéral de l’open market en décembre s’annonce comme le théâtre d’une des décisions les plus partagées depuis 2016. Le manque de données officielles en temps opportun a creusé l’écart entre les visions politiques concurrentes, tandis que les signaux contradictoires provenant du marché du travail et des données sur l’inflation accentuent l’incertitude.

Ambiguïté sur le marché du travail

Le rebond des emplois en septembre est contrebalancé par un ralentissement des embauches dans le secteur privé et une hausse du taux de chômage, qui passe à 4,4 %. Les données sur l’inflation envoient des signaux contradictoires. L’inflation fondamentale des dépenses de consommation personnelle se maintient autour de 2,9 % et l’’inflation fondamentale des services hors logement demeure autour de 3,3 %, ce qui souligne la persistance des composantes les plus cycliques de l’inflation.

Perspectives de politique monétaire

Bien que les communications récentes laissent entendre qu’une faible majorité appuie une nouvelle baisse de 25 points de base, les préoccupations de plusieurs présidents régionaux augmentent la probabilité de dissensions multiples. Dans ses indications prospectives, la banque centrale devrait adopter un ton plus prudent, en mettant l’accent sur la possibilité d’une pause au début de 2026. Comme l’inflation demeure supérieure à la cible et que la demande de main-d’œuvre montre des signes timides de stabilisation, il est peu probable que la Réserve fédérale égalise le nombre de baisses de taux actuellement anticipées par les marchés.

Canada : faiblesse de la demande intérieure et ralentissement de l’inflation

L’économie intérieure du Canada continue de faiblir, même si le PIB global masque cette faiblesse sous-jacente. La surprise à la hausse du troisième trimestre s’explique entièrement par une baisse exceptionnellement marquée des importations, avec peu de contribution de l’activité intérieure.

Un profil de croissance alimenté par les importations, et non par la vigueur économique

Les importations ont chuté à un rythme annualisé de 8,6 %, ce qui expliquait près de trois points de pourcentage du PIB trimestriel. La demande intérieure, en revanche, s’est contractée. La consommation des ménages a diminué pour la première fois depuis 2020, et l’investissement des entreprises a baissé pour un troisième trimestre consécutif. L’estimation avancée du PIB pour octobre, qui prévoit une baisse de 0,3 %, confirme ce ralentissement du momentum.

Les signaux du marché du travail demeurent contrastés

L’Enquête sur la population active montre de solides gains globaux, mais ces chiffres semblent surestimés en raison de problèmes d’ajustement démographique qui ne reflètent pas encore le ralentissement de l’immigration. En revanche, l’Enquête sur l’emploi, la rémunération et les heures de travail affiche des pertes d’emploi cumulatives jusqu’en septembre. Ces baisses sont concentrées dans la production manufacturière, le commerce de gros et de détail, ainsi que dans le transport et l’entreposage, des secteurs généralement plus sensibles aux conditions liées aux droits de douane et qui offrent une vision plus claire de la demande de main-d’œuvre sous-jacente.

Banque du Canada : pause dans l’assouplissement, mais pas la fin du cycle

La Banque du Canada devrait maintenir son taux directeur à 2,25 % lors de sa réunion de décembre. Bien que les décideurs soulignent que les droits de douane représentent une contrainte du côté de l’offre qui limite l’incidence des mesures de relance monétaire, la dynamique de l’inflation évolue. Les mesures fondamentales privilégiées par la Banque n’ont progressé que de 0,18 % en octobre, soit le rythme le plus proche de la cible depuis plus d’un an. Les derniers sondages auprès des entreprises montrent un recul continu des hausses de prix prévues, ce qui laisse croire que les pressions inflationnistes continueront de s’atténuer.

Si ces tendances se poursuivent et que la demande intérieure ne se renforce pas, la Banque devra probablement ramener le taux directeur sous le taux neutre d’ici le milieu de 2026.

Une période de divergences des politiques monétaires se profile

Les trajectoires des politiques monétaires d’Amérique du Nord commencent à diverger. La Réserve fédérale continue de faire face à une inflation persistante dans le secteur des services, à des dynamiques salariales tenaces et à un comité qui demeure divisé sur le rythme et le moment des mesures d’assouplissement futures. À l’inverse, la Banque du Canada fait face à un affaiblissement de la demande intérieure et à des pressions inflationnistes modérées, qui laissent entrevoir une politique plus souple en 2026. Cette divergence aura des répercussions sur les écarts de taux d’intérêt, le dollar canadien et la performance relative des marchés obligataires canadien et américain.

À l’aube de 2026, le défi pour les investisseurs sera de distinguer la volatilité cyclique des forces structurelles plus profondes qui influent sur les rendements. Les États-Unis continuent de profiter d’une demande sous-jacente plus forte et d’un marché du travail qui, bien qu’en perte de vitesse, demeure relativement résilient. Le Canada, quant à lui, évolue dans un contexte plus fragile marqué par une consommation en baisse, un ralentissement des investissements et une incertitude persistante liée aux politiques commerciales et aux expositions aux droits de douane.

Répercussions sur les portefeuilles dans un contexte de politiques divergentes

Ces dynamiques en évolution suggèrent plusieurs points à considérer pour les investisseurs qui évaluent des portefeuilles multiactifs :

La sensibilité au taux d’intérêt pourrait croître à mesure que les trajectoires de politique monétaire divergent

Comme la Banque du Canada devrait assouplir son approche plus rapidement et plus résolument que la Réserve fédérale, la duration relative des marchés des titres à revenu fixe canadiens et américains pourrait avoir une incidence sur la dispersion des rendements. Les investisseurs pourraient constater que les taux des obligations canadiennes s’ajustent plus rapidement aux conditions intérieures plus faibles, tandis que ceux des obligations américaines pourraient rester ancrés dans une tendance plus lente à la désinflation.

La dynamique des devises peut devenir une source de volatilité plus marquée

Une Banque du Canada plus accommodante, jumelée à une Réserve fédérale prudente, pourrait exercer une pression à la baisse sur le dollar canadien. Pour les portefeuilles diversifiés à l’échelle mondiale, ce contexte pourrait accroître la contribution de l’exposition aux devises au risque et au rendement globaux. Maintenir des mandats intégrant des stratégies sensibles aux devises ou une flexibilité de couverture intégrée pourrait aider à gérer ces fluctuations.

Le rendement des actions régionales pourrait refléter de plus en plus la dispersion macroéconomique

L’économie américaine, soutenue par une demande intérieure plus forte et des investissements axés sur l’IA, pourrait continuer d’afficher une résilience relative des bénéfices par rapport au contexte plus modeste du Canada. Les investisseurs pourraient donc privilégier des mandats axés sur la qualité et la capacité à générer des bénéfices aux États-Unis, tandis qu’au Canada, ils pourraient rechercher des gestionnaires qui mettent l’accent sur la solidité du bilan, la capacité de versement durable de dividendes et l’exposition à des secteurs moins sensibles à la consommation intérieure.

La diversification gagne en importance, et non le contraire

Un contexte de divergence des politiques monétaires accroît la valeur d’une vaste diversification entre les régions, les styles et les catégories d’actif. L’exposition à des stratégies alternatives qui offrent une faible corrélation avec les actions et les obligations traditionnelles, comme les stratégies macro systématiques, les contrats à terme gérés ou les solutions alternatives multistratégies, peut aider à réduire la volatilité globale du portefeuille pendant les transitions de politique monétaire.

Les forces structurelles doivent rester au cœur de l’évaluation du positionnement à long terme

La divergence des politiques peut dominer les discours de marché à court terme, mais des tendances durables comme le vieillissement de la main-d’œuvre, les contraintes budgétaires et les investissements dans des technologies favorisant la productivité devraient influer sur le rendement relatif des différentes catégories d’actif. Maintenir une exposition à des mandats qui capturent systématiquement ces moteurs de croissance structurelle peut aider les portefeuilles à aller au-delà du cycle immédiat des politiques monétaires.

Positionnement dans un contexte macroéconomique plus complexe

Dans ce contexte, les investisseurs pourraient avoir avantage à maintenir l’équilibre de leur portefeuille tout en s’assurant que chaque mandat offre une source de risque et de rendement distincte et complémentaire. À mesure que les trajectoires des politiques monétaires divergeront encore davantage en 2026, les différences quant à l’inflation, aux attentes de taux et à la dynamique de croissance devraient créer des occasions variées entre catégories d’actif. Le fait de se concentrer sur les mandats qui font preuve de discipline en matière de gestion des risques, de diversification entre les facteurs et les régions géographiques et de capacité à s’adapter à l’évolution des conditions macroéconomiques peut contribuer à soutenir la résilience des portefeuilles.

Corrado Tiralongo (il/lui)
Vice-président, Répartition de l’actif et chef des placements, 
Gestion de placements Canada Vie

Notes de bas de page et mise en garde
  1. L’inflation fondamentale des dépenses de consommation personnelle est la mesure privilégiée par la Réserve fédérale des États-Unis pour évaluer l’inflation sous-jacente. Elle suit les prix d’un vaste panier de biens et de services consommés par les ménages, mais exclut les aliments et l’énergie, qui ont tendance à être plus volatils. Cette mesure est considérée comme un indicateur plus stable des tendances de l’inflation, car elle reflète les changements dans le comportement des consommateurs, s’ajuste aux variations des habitudes de dépenses et capte la dynamique sous-jacente des prix. La Réserve fédérale s’en sert pour évaluer si l’inflation se rapproche de façon durable de sa cible de 2 %.
  2. L’inflation fondamentale des services hors logement désigne une mesure très restreinte de l’inflation des services, excluant à la fois les coûts liés aux aliments, à l’énergie et au logement. Elle comprend les composantes les plus cycliques et les plus sensibles à l’inflation, comme les services médicaux, les services de transport et les soins personnels. Comme ces catégories sont fortement influencées par la croissance des salaires et les conditions de la demande intérieure, l’inflation fondamentale des services hors logement est souvent considérée comme un signal de la persistance de l’inflation sous-jacente et est surveillée de près par les banques centrales lorsqu’elles évaluent si les pressions sur les prix s’atténuent.
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